Les
« Détails d’œuvres » sont le
fruit d’un délire artistique réalisé avec la complicité du photographe
Richard Volet.
- Pourquoi ne réaliserais-tu pas
une série de tableaux qui traiteraient tous d’un même sujet… ? Une partie du
corps féminin, par exemple…
L’admiration que j’ai toujours
eue pour « l’œil » de Richard m’a incité à relever le défi. Je me suis mis
à l’œuvre et j’ai réalisé 58 seins au crayon.
L’événement
ressembla davantage à une performance qu’à une
exposition. Son organisation s’est déroulée dans
une atmosphère d’euphorie totale. Nous avions
décidé que le jour du
« vernissage », le public serait libre de décrocher les tableaux
convoités et de les emporter sur le champ.
Une soirée mémorable qui
eut
cependant un couac : nous n’avions pas prévu un tel succès. En quelques
heures, les murs de la galerie furent dégarnis, laissant les visiteurs
retardataires sur leur faim.
La presse de l’époque l’a trouvée
un peu amère. On ne plaisante pas avec l’Art…
Le concept « Détails d’œuvre » se
devait d’être éphémère.
Il le fut…
Pour
la petite histoire, le vernissage de l’exposition des « 58 Seins », qui
eut lieu le 26 octobre 1990, était initialement prévue le 1er
novembre, fête de la Toussaint…
|
Tiré de la chronique de l'époque...
Des seins menus vendus à l'emporter
Le
dessinateur Didier Mouron n'aime pas les vernissages mondains. Son exposition,
qui débute ce soir au Mont-Pèlerin, sera érotique, brève et anticonformiste. Les
amateurs pourront se servir directement sur les murs, passer à la caisse et s'en
aller. Au lieu d'attendre sagement, comme il est d'usage, que l'exposition soit
arrivée à son terme.
La galerie
sera ainsi un self-service où chacun pourra faire ses emplettes de petits
dessins de seins.
Art fast-food ?
«En cette
année 1990, je me sens créativement très fort ».
Gonflé à
bloc, le dessinateur Didier Mouron, 32 ans, aurait pu, par exemple, montrer ses
pectoraux d’acier. Pas du tout. Il a croqué cinquante-huit fois la plus belle
forme que nous ait donné la nature: le sein féminin.
Ce soir,
dans sa galerie du Mont-Pèlerin, le vernissage de son exposition sera un
véritable self-service.
L'ennui
empesé qui prévaut habituellement lors des vernissages énerve Didier Mouron. Le
fait que,
lors d'une
exposition, on soit contraint d'attendre parfois un mois avant d'emporter
l'œuvre pour laquelle on eu le coup de foudre le met hors de lui. Il a donc
décidé d'innover. Son exposition, elle, ne durera que jusqu'à dimanche soir.
Et, dès la
première seconde du vernissage, ce soir à 19 h, l'amateur de dessins érotiques
pourra décrocher le dessin choisi, le mettre sous le bras et prendre ses jambes
à son cou. Après, bien sûr, s’être acquitté des 550 francs requis pour chacune
des cinquante-huit œuvres présentées.
«Le plus
grand plaisir de Didier Mouron serait de voir partir ses dessins comme des
feuilles mottes en cette saison », note son attaché de presse. C'est tout le mal
qu'on lui souhaite. Cette manière de faire nous rappelle toutefois une autre
saison. L’hiver, la période des soldes, la frénésie savamment orchestrée de
l'achat à tout prix : « Il ne vous reste que deux minutes pour profiter de notre
action, dépêchez-vous ! »
Et peu importe. Car si l'idée est
vulgaire, son art ne l'est pas. Le dessinateur est doué et son approche
monomanique du corps féminin, somme toute intéressante. Il reste que ce jeune
homme a eu une mauvaise fréquentation. En 1985, à New York, il a exposé ses
ouvres dans l'appartement de Donald Trump, tout en haut du building construit
sur la 5e Avenue par le célèbre financier mégalomane. Trump-Mouron, même combat
!
■
L'Est Vaudois, 26 octobre 1990
Luc Debraine
|